En Guinée-Bissau en 1998
Par Cédric Favero TU5KY
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En juin 1998, un coup d'état secoue la capitale de la Guinée-Bissau. Les forces sénégalaises sont intervenues et la délégation régionale de Dakar a déployé une équipe dans le pays. L'ingénieur système de Dakar, en raison de sa nationalité, ne pouvait pas se rendre en Guinée-Bissau et donc la mission m’a été assignée.
La fédération me met à disposition de magnifiques caisses de transport en aluminium qui permettront, en principe, d’amener tout le matériel nécessaire à Bissau. Si l’ensemble des équipements arriveront sans encombre à Dakar, la suite du voyage s’avèrera un peu plus compliquée. En effet, impossible de se rendre à Bissau par avion, les combats ayant lieu autour de l’aéroport et les frontières sont officiellement fermées. Le CICR loue alors un petit Cessna qui nous amènera, un délégué et moi-même, à Bubaque, dans l'archipel des Bijagos. Bien évidemment les caisses ne rentrent pas dans l’avion et ce dernier décollera avec plus de 150 kilos de matériel chargé en vrac.
A Bubaque, un service d’accueil nous attend. Grâce aux contacts de la délégation de Dakar, l’UICN (Union Internationale pour la Conservation de la Nature) nous met à disposition ses infrastructures et son personnel, la mission ayant été évacuée par les chercheurs. Nous disposons dès notre arrivée d’une voiture, d’un bateau, d’un bureau et d’une station HF qu’il suffira de reprogrammer pour établir la communication avec Dakar. Nous passons deux jours à Bubaque et en profitons pour faire une évaluation de la situation humanitaire et trouver un piroguier qui veut bien nous faire traverser les 70 kilomètres du turbulent canal de Geba pour rejoindre Bissau.
Débarquement à Bissau, alors en proie à d’intenses échanges d’artillerie, et tentative d’installation d’une station radio HF (Codan 9360) et VHF (Motorola GM300) dans la résidence de la délégation de la fédération, qui est transformée pour quelques temps en délégation CICR. Compte tenu des combats, l’antenne HF ne sera qu'un long fil lancé avec une fronde dans les arbres situés de l’autre côté de la rue, l’accès au toit étant beaucoup trop risqué. Je reste quelques jours à Bissau, le temps de trouver une solution pour retourner à Bubaque. Grâce aux forces françaises déployées pour protéger l’ambassadeur resté sur place comme facilitateur entre les rebelles et le gouvernement, nous avons comme seule nourriture, des rations de combat. Il s’avèrera qu’elles sont toutes identiques et nous aurons comme unique menu du navarin d’agneau.
Le retour à Bubaque se fait sur un bateau du ministère de la pêche, accompagné d’un journaliste de la BBC, de l'ambassadeur de France et de huit marsouins (commandos de marine chargés de la protection rapprochée de l'ambassadeur).
A notre arrivée dans les Bijagos, nous sommes tous été invités à partager un repas avec l'ambassadeur et son épouse, qui arrivée de Dakar avec le petit Cessna, a organisé un repas à l’occasion de leur 20eme anniversaire de mariage. L’ambassadeur et son escorte retourneront à Bissau dans l’après-midi, tandis que nous nous envolerons pour le Sénégal.
Août 1998, deuxième mission en Guinée-Bissau. Cette fois-ci le but est d’installer une station radio dans la sous-délégation établie à Bafata, dans le centre du pays. L’accès se fait par la route, au départ de Dakar. Je pars seul au volant d’une Landcruiser accompagné d’un douanier qui fera la route avec moi jusqu’au poste frontière de Sinndabou situé à 750km de Dakar, le véhicule étant sous douane.
Arrivé sur place, le douanier prend le bus pour retourner à Dakar, mais les troupes sénégalaises sur place refusent de me laisser traverser la frontière malgré les déclarations du président sénégalais Diouf qui proclame que la frontière est ouverte pour les humanitaires. Une longue discussion s’installe avec le colonel en charge qui me précise qu’il connaît très bien le CICR et me propose d’appeler le président Diouf pour trancher la question. Je serai finalement autorisé à passer la frontière, sans possibilité de retour, la réimportation du véhicule n'étant pas autorisée et ce sans appeler la présidence
Mon voyage se poursuit par 120 km de route et de piste, seul au milieu de nulle part à la nuit tombée, avec pour seul moyen de communication une liaison radio avec Dakar ou Abidjan, selon les effets de propagation. Je passe 10 jours ici car si le but annoncé est l'installation d'une station radio, il faut au préalable faire fabriquer tout le mobilier, trouver une l’entreprise qui nous construit et installe un groupe électrogène en assemblant des éléments recyclés, puis finalement trouver au marché le câble permettant de relier le générateur à notre délégation. Une fois tout cela installé, l'installation radio, à savoir : 2 émetteurs HF Codan 9360, un modem Pactor-3, une station VHF Motorola GM300, une station VHF aviation Icom, un téléphone satellite Nera Inmarsat Sat-M et leurs antennes respectives (Delta-Loop, antenne T2FD Barker&Williamson, un quart d’onde Wipic et une 5/8 d’onde Hustler) peut enfin commencer à travailler.
Cédric Favero TU5KY
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